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Festival 12.09.2022

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Les Choralies de Vaison-la-Romaine

Ave Vaison avé l’assent

Ave Vaison. Cette accueillante cité, connue des choristes pour avoir été labellisée « Cité chorale Européenne » grâce aux fameuses Choralies est également appréciée des touristes attirés par l’histoire ancienne. En effet, en 1924, Vaison s’est vue renommée Vaison-la-Romaine en raison des vestiges que l’on ne s’attend pas forcément à trouver en cet endroit du sud français. Il y est donc loisible de fouler des pavés de l’époque gallo-romaine, de visiter un musée où sont exposés toutes sortes d’objets antiques dont des statues originales retrouvées dans les fosses du théâtre antique, théâtre dans lequel ont lieu les concerts de gala des Choralies. La partie haute de la ville reste un site médiéval merveilleusement conservé. Musique chorale et histoire…

Plus en images

https://www.youtube.com/watch?v=6gKLA2OnFWI

La ville haute, photo T.Dagon

Vaison-la-Vision

Agréable. Très agréable. Nous sommes dans une région où l’on se sent bien d’emblée. L’accent autochtone nous met de bonne humeur, la cuisine et les vins régionaux ne peuvent qu’enchanter (nous sommes entre Châteauneuf-du-Pape et Gigondas…). Les rayons du soleil nous incitent, entre deux concerts, à nous prélasser sur les accueillantes terrasses de la place Montfort. Le marché ponctue régulièrement la vie locale en proposant des odeurs de tapenade, de truffes et de fruits gorgés de soleil. Musique chorale et gastronomie…

 

Avignon-Vaison en aviron ou en avion ?

Mais voilà… pour arriver à Vaison, si l’on est un tant soit peu soucieux d’écologie et que, subséquemment, l’on souhaite s’y rendre sans voiture, c’est la croix et la bannière. Après une heure trois quart de retard sur le trajet Lyon Avignon, lequel devrait durer une heure et quart : rien… le désert. Un bus pour Orange dans trois heures et il faudra encore attendre pour relier Orange et Vaison. L’on se prend à louer, en de solennels accents -cette-fois-ci- les vertus et gloire de nos CFF. Quand bien même la ville est le centre d’un festival international, les bus se présentent au compte-goutte. Aucune navette n’est organisée par le festival ! Musique chorale et Pacific 231…

Les Choralies

La cité chorale européenne propose à l’amateur éclairé comme au débutant une offre inédite de 40 ateliers de pratique collective sous la direction de chefs renommés. Pour une durée d’un à huit jours, les ateliers rassemblent des chanteurs venus de toute l’Europe pour travailler une œuvre ou un répertoire thématique. Festival de la pratique chorale, les Choralies offrent aussi au grand public l’occasion de découvrir la vitalité de la scène chorale au cours de plus de 70 concerts dans toute la ville. Œuvres du répertoire, pop vocale, création contemporaine, chanson ou musiques traditionnelles : les chœurs démontrent l’incroyable diversité de l’art vocal, qu’ils soient amateurs, semi-pro ou professionnels. Chaque soir, le magnifique théâtre antique de Vaison-la-Romaine accueille les festivaliers et le public pour des concerts de la fine fleur de la scène chorale internationale. Chaque concert est précédé par une expérience unique : le chant commun, 4.000 voix qui se joignent et s’élèvent au coucher du soleil pour enchanter les étoiles. Rendez-vous du chant choral, le festival propose également un programme de rencontres et de conférences pour les chanteurs, chefs de chœur et managers. Un festival pas comme les autres donc, porté par le réseau À Cœur Joie et organisé par des équipes bénévoles (pas loin de 500 personnes pour cette édition) qui s’investissent dans la bonne humeur pour partager leur passion du chant collectif.

Concerts en plein air

Giovanni cantori di Torino, photo : T. Dagon

Ne restant que deux jours à Vaison-la-Romaine, nous avons pu toutefois nous imprégner des différentes activités. Les rues et places de la cité résonnent de concerts en plein air. Beaucoup de chœurs de jeunes, de très bon niveau, présentent des programmes dont l’éclectisme fait l’attrait. La majorité d’entre eux offrent la parfaite image de ce que les jeunes chanteurs aiment : aucun sectarisme de styles. Chaque chœur sait faire sonner une pièce du répertoire « classique », du Moyen-Âge à nos jours, de la chanson (bien) harmonisée, de la musique populaire de sa région, du jazz vocal, se déchaîne avec de la bodypercussion… Si les conditions acoustiques ne sont pas toujours idoines en plein air, l’enthousiasme de ces jeunes et la qualité de leurs prestations emporte l’adhésion du public.

Coro de Jovenes de Madrid, photo : T. Dagon

Ateliers

Il y en a vraiment pour tous les goûts. Nous avons suivi une répétition du Requiem de Mozart dans l’atelier de Jan Schumacher. Ce merveilleux chef allemand n’est pas un inconnu des choristes suisses. Il y a également dirigé des ateliers et a fait partie de quelques jurys (dont le concours suisse des chorales à Aarau et le Montreux Choral Festival). Si, en aparté, il trouve dur d’être victime de son succès eu égard au nombre par trop important de choristes pour du Mozart, son énergie incroyable, son exigence implacable mais toujours soulignée par un trait d’humour, réussit à galvaniser la septantaine de choristes. En deux temps trois mouvements, il transforme l’Agnus Dei quelque peu flottant en une version précise, sensible et très habitée. Une émotion parmi d’autres, le constat d’un mélange de générations qui prouve, si besoin est, que la musique classique n’est pas réservée aux cheveux argentés !

 

rencontre entre générations de basses, photo : T.Dagon

Les concerts du soir au théâtre antique

Théâtre antique. Photo : T. Dagon

Tout commence par… un concert du public. Un cahier de chants communs est publié pour ce faire. Une fois le très nombreux public installé dans les gradins de ce magnifique amphithéâtre, un chef se retrouve seul sur scène. Un chef. Et pas n’importe lequel. Denis Thuillier est génial, drôle, énergique, efficace !!! On constate avec plaisir que l’assemblée de choristes est constituée de lecteurs avertis (mais oui, c’est tellement plus agréable de savoir lire la musique si l’on a envie de chanter…). Après quelques essais en voix séparées, hop, c’est parti à quatre voix pour une prestation plus qu’honorable, et ce dans une joie merveilleuse. Mais chut, c’est l’heure du concert… Celui que nous avons suivi est tenu par l’ensemble Aedes. Sa présentation comme étant la fine fleur de l’art choral français n’est de loin pas usurpée. Fondé en 2005 par Mathieu Romano, l’ensemble explore toutes les époques, de la musique baroque aux œuvres a cappella des XXème et XXIème siècles jusqu’à la création contemporaine, sous forme de mises en scène originales. Son aisance scénique fait qu’il est régulièrement invité et salué en tant que chœur d’opéra sur les plus belles scènes lyriques française. Ce soir, leur programme est libellé « America ». Entre Bernstein, Gershwin ou les musiques de Mary Poppins un concert bonheur, un moment idéal dans l’ambiance des Choralies. Un programme de musique américaine dont le seul dénominateur commun est l’énergie. Les dix-sept chanteurs ont des voix bien timbrées, connaissent leur partition sur le bout de la glotte et s’impliquent avec une aisance déconcertante dans des partitions difficiles. Aux côtés du chef Mathieu Romano, le pianiste Yoan Hereau est un complice de chaque instant. Il n’est pas seulement un accompagnateur, il fait totalement corps avec les chanteurs. Du grand art ! Comme toujours aux spectacles de gala des Choralies, il y a une équipe de techniciens absolument incroyable. Pour la diffusion du son, bien sûr : pour ce concert, chaque choriste est amplifié individuellement, ce qui est obligatoire au vu des nombreux déplacements scéniques. Le résultat est parfait d’équilibre. Si l’on y songe de plus près, c’est loin d’être évident, tant pour le chef que pour l’ingénieur du son. Et puis il y a les spécialistes de l’image. Ici, pas de scène en led, pas d’effets optiques délirants, mais un chœur qui chante, avec une conception lumineuse sobre, efficace, et totalement en phase avec la musique. Gilles Fournerau a signé une création lumineuse qui sait donner une couleur en corrélation avec chaque instant musical. Jean-Michel Fournereau, quant à lui, a su tirer le meilleur de chaque choriste par une mise en scène soignée, imaginative et forte. Que l’on passe de la comédie musicale au negro spiritual en faisant un arrêt John Cage, tout est présenté avec le même bonheur.

…Et le public est exceptionnel par sa culture musicale : que l’on soit dans West Side Story, chez Disney ou dans des œuvres plus classiques, il connaît tout et surtout apprécie !

Le soir, après le concert, de nombreux choristes se retrouvent sur les terrasses, distribuent des partitions et c’est parti « jusqu’à pas d’heure » pour une soirée de lecture à vue dans une ambiance très joyeuse !

 

 

 

Photos

Devant la poste : Giovanni cantori di Torino

Devant le village : Coro de Jovenes de Madrid

Sur la place, concerts nocturnes spontanés sur les terrasses de bistrot (vidéos)

Vidéos et deux photos atelier Requiem Jan Schumacher : rencontre entre générations de basses

 

Thierry Dagon